28 octobre 2022 | Freedomofconscience.eu

La Coordination des Associations et des Particuliers pour la Liberté de Conscience (CAP LC) est une ONG ECOSOC qui depuis 20 ans prend la défense des minorités religieuses, convictionnelles ou spirituelles, discriminées et stigmatisées sous l’appellation de « sectes » en France.

Le gouvernement français a institué un système unique en Europe de surveillance de ces minorités qui entraîne de graves manquements de l’Etat aux principes de liberté de religion ou de croyance, d’égalité des citoyens français devant les institutions nationales et de fraternité en clivant les citoyens selon leur appartenance à une minorité religieuse ou de croyance reconnue ou non et en instaurant un climat de suspicion et parfois même de haine pour les croyances non traditionnelles et non normatives.


43e Session Examen périodique universel, Les conditions de détention en France

Coordination des Associations et des Particuliers pour la Liberté de Conscience

117, rue de Charenton 75012 Paris France

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La Coordination des Associations et des Particuliers pour la Liberté de Conscience (CAP LC) est une ONG ECOSOC qui depuis 20 ans prend la défense des minorités religieuses, convictionnelles ou spirituelles, discriminées et stigmatisées sous l’appellation de « sectes » en France.

Le gouvernement français a institué un système unique en Europe de surveillance de ces minorités qui entraîne de graves manquements de l’Etat aux principes de liberté de religion ou de croyance, d’égalité des citoyens français devant les institutions nationales et de fraternité en clivant les citoyens selon leur appartenance à une minorité religieuse ou de croyance reconnue ou non et en instaurant un climat de suspicion et parfois même de haine pour les croyances non traditionnelles et non normatives.

CAP LC est profondément préoccupé par la différence de traitement avérée notamment par les institutions judiciaires pour les membres des minorités religieuses, convictionnelles ou spirituelles. Il existe en effet en France un système judiciaire spécifiquement adapté pour les membres de ces minorités, bien que l’arsenal juridique français tant au niveau administratif, civil que pénal soit très bien doté et permette la justice.

Lorsqu’un membre d’une de ces minorités se trouve confronté à la justice, il entre dans un circuit bien rodé et bien bordé dans lequel il est condamné avant même d’être jugé.

Ce système s’articule comme suit :

– Le gouvernement français finance à plus de 80% des associations de lutte contre les dérives sectaires, qui ont été souvent elles-mêmes condamnées en justice pour abus de leurs prérogatives et qui contribuent fortement à la diabolisation des mouvements spirituels minoritaires ;

– des cellules de veille sont intégrées dans les Préfectures ;

– création d’une Misson interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES) aujourd’hui rattachée au ministère de l’Intérieur ;

– établissement en 2009 d’une section de police judiciaire dédiée entièrement aux sectes et dérives sectaires, la CAIMADES (Cellule d’assistance et d’intervention en matière de dérives sectaires) ;

– Formation aux dérives sectaires dispensée depuis 1998 aux élèves de l’Ecole Nationale de la Magistrature par des représentants d’associations antisectes, ceux-ci enseignant sur une base partisane et à charge, ce qui a pour conséquence de voiler l’objectivité des futurs magistrats et d’influencer leur intime conviction dans leurs futures affaires.

Depuis 2002, nous constatons que cette particularité du système judiciaire français a mis à mal l’indépendance et l’équité de la justice et a dérivé, pour certaines affaires vers de la détention arbitraire sur la seule base d’appartenance à un mouvement religieux, spirituel ou convictionnel minoritaire.

Une personne physique ou morale qui commet un délit ou un crime, qu’elle soit apparentée ou supposée être apparentée à une croyance non normative doit être présumée innocente et se doit d’être jugée au même titre que tout autre citoyen français en se basant sur les Lois et Codes de la justice française en toute impartialité.

Pourtant, afin de justifier leur existence, leur légitimité et l’allocation de leur budget, les associations antisectes et certains organes institutionnels se doivent de faire exister à tout prix un phénomène qui n’existe pas : celui des dérives sectaires.

Cette particularité française de devoir faire exister pour justifier de son bien-fondé un phénomène qui n’existe pas a conduit à de graves manquements et dérives que nous étayerons ci-après par une affaire se déroulant actuellement et suivie par notre association.

Et nous développerons en annexe une affaire antérieure similaire corroborant cette problématique.

L’affaire Cyrille Adam

Mr Cyrille ADAM est le guide spirituel d’environ 150 élèves depuis plus de 30 ans. Son Enseignement a pour but l’ouverture de la Conscience pour cela il utilise différentes voies.

Il a été arrêté le 7 décembre 2021 et incarcéré le 9 décembre à la prison de Nîmes pour des accusations portées par 6 personnes pour des motifs de : viols aggravés, dérives sectaires, stupéfiants.

Les faits reposent uniquement sur des témoignages évoquant l’emprise. Il s’agit d’un homme qui est parti après plus de 20 ans dans l’Enseignement, de sa femme, de sa sœur et de 3 autres femmes.

La MIVILUDES a transmis un signalement au Procureur, qui a ordonné des investigations durant 2 ans.

C’est la CAIMADES qui a été chargée de mener l’enquête sur cette l’affaire qui a débuté le 24 janvier 2022.

L’avocat des plaignants n’est autre que l’époux de la présidente de l’association antisecte qui dispense des formations à l’école de la Magistrature.

À la suite de son incarcération, l’avocate de Mr Adam a déposé un certain nombre de requêtes auprès du tribunal dont beaucoup n’ont pas abouties :

– par deux fois, l’avocate de Mr Adam a déposé une requête sur les conditions de détention indignes dont la première a déclenché le transfert du centre pénitentiaire de Nîmes à celui de Béziers le 4 mai, la seconde, refusée par la Chambre d’Instruction, maintient Mr Adam en détention,

– des demandes de permis de visite ont été refusées sur des motifs de mise en péril de la manifestation de la vérité et risques de pression sur les plaignants par l’entourage de Mr Adam,

– la demande d’isolement dans une cellule particulière pour des raisons de santé à la prison de Nîmes en juin 2022 a également été refusée. Il a été précisé qu’aucune prison dans le sud-est de la France n’était en mesure de l’accueillir dans une cellule seule pour répondre à sa demande d’isolement,

– la demande qu’une expertise médicale soit réalisée pour vérifier si l’état de santé de Mr Adam est compatible avec la détention, et puisse attester du risque d’engagement de son du pronostic vital et de la nécessité de l’alternative de la contrainte en liberté surveillée plus adaptée à sa situation.

En effet, son état de santé s’est grandement dégradé en prison. Mr Adam souffre d’une maladie chronique auto-immune dont les symptômes ont été exacerbés par les conditions de détention exécrables en faisant craindre pour sa vie. Son médecin traitant a alerté les Maisons d’arrêt de Nîmes et de Béziers et a transmis son dossier médical à son avocate qui l’a adressé au juge, mais toujours rien depuis, n’a été pris en compte.

a) Les préjugés sur les sectes, menaces pour la partialité et l’équité de jugement

Certains témoins entendus par la CAIMADES nous ont fait par des pressions subies lors de des auditions pour orienter leurs témoignages à charge contre Mr Adam :

– seulement 6 personnes ont été interrogées à décharge depuis l’incarcération de Mr Adam, contre une dizaine de personnes interrogées à charge.

Un appel à témoin a été fait sur les réseaux sociaux en Décembre 2021 par la Police Nationale pour tenter d’obtenir des témoignages à charge qui s’avèrent être inexistants en dehors des témoignages des plaignants, au point qu’un des plaignants a dû faire du « démarchage » auprès des commentateurs de la publication pour les inciter à contacter la police. Ses commentaires ont été supprimés par la suite par l’administrateur du compte de la Police Nationale.

– toutes les questions posées par les enquêteurs de la CAIMADES se sont révélées être orientées pour démontrer la culpabilité de Mr Adam, certaines des questions étant omises dans le procès-verbal. Les témoignages sur les plaignants ont été systématiquement rejetés.

– erreurs intentionnelles, selon certains témoins, dans la transcription de leurs procèsverbaux comme lorsqu’une des personnes interrogées a dit « Il n’a jamais manqué de respect aux femmes, ni mêmes aux hommes d’ailleurs », la transcription a été : « Il a toujours manqué de respect aux femmes et aux hommes »

– pressions sur les témoins à la relecture des procès-verbaux : un des témoins s’est vu répondre « Je vous préviens, vous ne pourrez rien changer au procès-verbal parce que je sais ce que j’aurais dit, je suis un agent de la police, je connais bien mon métier »,

  • questions insistantes et hors de propos sur la vie intime, et tentatives d’intimidation lorsque le témoin ne souhaite pas répondre.

Il est constatable qu’il y a une instruction à deux vitesses lorsqu’il s’agit des demandes à charge ou à décharge, en effet les demandes d’auditions faites en février et mars 2021 pour des témoignages contre les plaignants n’ont toujours pas été examinées.

Aucune date n’est fixée à ce jour pour la confrontation avec les plaignants alors que la demande date du 27 avril dernier.

Mr Adam se voit refuser l’attente de son procès en liberté surveillée comme la loi du 15 août 2014 (qui multiplie les alternatives à l’incarcération) le permet, parce qu’il est « préjugé » gourou d’une secte et donc dangereux, sans aucune preuve établie de sa dangerosité, seulement parce qu’il est victime des a priori et préjugés instillés à tous les étages du système judiciaire par l’entrisme de l’idéologie antisecte.

b) L’enfer carcéral français

Mr Adam, qui comme tout citoyen français est présumé innocent, se retrouve en détention provisoire en attente de son procès dans des conditions indignes d’un pays tel que la France.

Malgré l’adhésion de la France au PIDCP, à la règle de Tokyo, aux recommandations de l’ONUDC sur les conditions de détention, elle a été épinglée à plusieurs reprises sur cette question par la CEDH, l’OIP et le CPT (1) ainsi que lors de son EPU en 2018 qui recommandait à l’article B.1/25 du rapport(2) que la France: « améliore d’urgence les conditions de détention en appliquant les recommandations du Contrôleur général des lieux de privation de liberté, notamment par un recours accru à des peines de substitution à la privation de liberté, conformément aux Règles minima des Nations Unies pour l’élaboration de mesures non privatives de liberté »

Le 20 avril 2021 une loi a été votée, destinée à garantir le droit au respect de la dignité en détention.

Mr Adam a été le premier à bénéficier de ce texte de loi, malheureusement son application reste incertaine et inefficace comme l’avait pressenti le Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté (CGLPL) dans sa réponse à la demande de mise en application de cette loi pour Mr Adam, le 5 juillet 2022 : « En amont de l’adoption de cette loi, j’ai à plusieurs reprises alerté les pouvoirs publics sur les limites du dispositif ainsi envisagé, et notamment sur la place centrale qu’il accorde au titre des mesures présentées comme susceptibles de mettre un terme à une détention indigne, au transfert de détenus entre établissements pénitentiaires. Cette approche présente en effet le risque de voir l’administration pénitentiaire se concentrer sur la nécessité de « déplacer » les détenus dont les requêtes sont jugées recevables, au lieu de remédier aux nombreux dysfonctionnements structurels qui sont à l’origine de l’indignité des conditions de détention dans certains établissements. »

Malheureusement ceci s’est vérifié pour Mr Adam qui après avoir fait la procédure de dénonciation de ses conditions indignes de détention à la maison d’arrêt de Nîmes (une des pires prisons françaises au niveau de la surpopulation et de la vétusté selon un rapport de l’OIP (3)), Mr Adam, a été transféré à la maison d’arrêt de Béziers où les conditions de détention et de surpopulation se sont avérées identiques dans l’indignité.

Voici détaillées les conditions de détention indignes subies par Mr Adam, sexagénaire atteint d’une maladie chronique auto-immune, qui nous le rappelons ici, est un citoyen français présumé innocent, en détention provisoire en attente de son procès :

– Partage avec 3 personnes une cellule de 12m²,

– Sans lumière naturelle et sans aération,

– Dort sur un matelas à même le sol,

– N’a droit qu’à 3 douches par semaine,

– Repas de mauvaise qualité,

– Ne peut dormir la nuit à cause des nuisances sonores des postes de télévision allumés 24h/24,

– Tabagisme passif subi avec des codétenus fumeurs à toute heure du jour ou de la nuit,

– Inhalation de fumées de cannabis qui remontent toute la nuit des cellules endessous de la sienne, entraînant avec la chaleur l’irrespirabilité de la cellule,

– Impossibilité d’accès aux promenades à cause de ses difficultés à se mouvoir,

– Pas de visite médicale,

– Refus de lui fournir un fauteuil roulant,

– Injures et molestation de la part d’un surveillant ayant entraîné une blessure au coude,

– Vol d’effets personnels et injures de la part de codétenus,

Les conséquences de ces conditions de détention sont alarmantes pour la santé de Mr Adam qui souffre depuis de problèmes circulatoires, de problèmes cardiaques et respiratoires, d’une dangereuse perte de poids, de tremblements, et de difficultés de coordination des membres, de perte de mémoire temporaires, d’impossibilité de se déplacer sans assistance …

De nombreuses démarches ont été initiées par son avocate et son médecin traitant pour alerter de la nécessité d’une prise en charge médicale spécifique à cause de sa maladie chronique et d’une absence de soins qui ont détérioré et ce, de façon irrémédiable selon l’avis de son médecin traitant, sa santé. Ces demandes sont restées sans suite.

Recommandations à la France

Il est inacceptable et insupportable qu’au XXIème siècle, dans un pays civilisé, soucieux des droits de l’Homme comme la France, n’importe lequel de ses citoyens, présumé innocent, puisse se retrouver dans l’intolérable situation de Mr Adam.

Malgré l’institution de la loi du 20 avril 21 en réponse à son EPU de 2018, le respect de la dignité et les conditions de détention ne se sont pas améliorés en France.

Nous demandons instamment à la France :

  • De respecter au sein de ses institutions mêmes, l’article 18 de la DUDH pour tous ces citoyens, y compris les membres de minorités religieuses, spirituelles ou convictionnelles sans distinction,
  • De respecter les conventions internationales sur la privation de liberté, et les conditions de détention de l’UNODC, du PIDCP, de la CEDH,
  • De mettre en œuvre, sans délai les recommandations de l’EPU de 2018 sur la privation de liberté, et les conditions de détention.
  • Et d’enquêter de toute urgence sur le cas de M. Adam afin que lui – et tous les citoyens français – puissent espérer un procès équitable dans un délai raisonnable et puissent l’attendre dans des conditions décentes dans le respect des droits de l’homme comme la France s’est engagée à le faire.

Sources :

(1) https://undocs.org/Home/Mobile?FinalSymbol=CAT%2FC%2FFRA%2FCO %2F7&Language=E&DeviceType=Desktop&LangRequested=False

(2) https://documents-ddsny.un.org/doc/UNDOC/GEN/G18/102/50/PDF/G1810250.pdf?OpenElement

(3) https://oip.org/wp-content/uploads/2022/07/oip-rapport-soinsspe-07-2022- planches.pdf

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