Sénat 11ème législature

Question écrite

Nº 34188 de M. DUPONT Jean-Léonce du groupe RI
publiée dans le JO Sénat du 5 juillet 2001 p. 2218

Ministère de réponse : Culture
publiée dans le JO Sénat du 14 février 2002 p. 467

Texte de la QUESTION :

M. Jean-Léonce Dupont attire l’attention de Mme le ministre de la culture et de la communication sur les nouvelles dispositions relatives à l’utilisation des cathédrales hors manifestations cultuelles. Les maires des villes concernées viennent d’apprendre que la direction de l’architecture et du patrimoine a confié au Centre des monuments nationaux la gestion des cathédrales. Or, depuis la séparation de l’Eglise et de l’Etat, les cathédrales sont des lieux de culte perpétuels et gratuits. La mise en place d’une nouvelle réglementation restrictive, lourde et financièrement pénalisante pour les associations qui y organisaient des manifestations est également très préjudiciable à l’animation de ces villes. Les tarifs pratiqués (3 000 francs pour un concert avec billetterie et 1 500 francs par répétition) sont décourageants pour les organisateurs. Cette réglementation supplémentaire, qui s’inscrit dans une politique de recentralisation de l’Etat, est par ailleurs totalement inopportune en cette année 2001 où la France célèbre le centième anniversaire de la loi de 1901. Dans une ville comme Bayeux, qui ne compte que 15 000 habitants, une telle mesure est proprement décourageante pour l’ensemble du monde associatif et culturel. Les archiprêtres de France, responsables des cathédrales, protestent eux aussi contre cette nouvelle réglementation. La plupart d’entre eux ont décidé de ne plus accepter de manifestations culturelles aussi longtemps que l’utilisation des lieux sera payante. Des manifestations ont déjà été annulées dans certaines villes et l’on peut craindre un recul important de la culture dans ces lieux chargés d’histoire. Il serait pour le moins paradoxal que le ministère de la culture, dont la première mission est la diffusion de la culture, prive, par une telle mesure, les nombreux publics de rencontres culturelles majeures, notamment en province. La tarification imposée témoigne d’une désinvolture à l’égard d’un lieu de culte dont il aurait fallu respecter l’esprit. D’autre part, cette mesure est accompagnée de contraintes supplémentaires, telles l’interdiction de principe d’utiliser le réseau électrique de la cathédrale ou de mettre des extincteurs supplémentaires comme s’il était plus dangereux d’assister à un concert que d’aller à un office religieux. Il lui demande de bien vouloir revenir sur cette réglementation et de laisser la gratuité de l’utilisation des cathédrales pour les associations sans but lucratif dans les conditions habituelles, qui ne soulevaient jusqu’à présent aucune problème particulier.

Texte de la REPONSE :

Les quatre-vingt-sept cathédrales appartenant à l’Etat, en France, sont classées parmi les monuments historiques et affectées au ministère de la culture et de la communication, qui en a confié la gestion domaniale, par convention du 10 avril 1998, cosignée par le ministère de l’économie, des finances et de l’industrie, au Centre des monuments nationaux, également gestionnaire pour le compte de l’Etat de près de 150 autres édifices. Le Centre des monuments nationaux a donc, notamment, été chargé d’autoriser, au nom de l’Etat, les manifestations non cultuelles dans les cathédrales et de percevoir les redevances correspondantes. Ces cathédrales sont par ailleurs, selon les termes des lois de séparation des églises et de l’Etat (qui ne s’appliquent pas aux cathédrales de Strasbourg et Metz, demeurées sous le régime concordataire),  » mises à la disposition des fidèles et des ministres du culte pour la pratique de leur religion « . Cela signifie notamment que l’utilisation cultuelle de ces édifices est prééminente. Il convient de trouver, dans le respect des droits et prérogatives de chacun, un système permettant l’organisation dans les cathédrales de manifestations non cultuelles, dont la vocation serait évidemment culturelle, sans apporter la moindre gêne à l’exercice du culte et sans porter atteinte au droit d’usage prééminent du clergé et des fidèles. Des contacts ont été pris avec les représentants de l’épiscopat français, pour parvenir ensemble à un accord concernant ce système de gestion. Dans l’attente, le calcul de ces redevances doit pouvoir être apprécié au cas par cas, selon l’importance de l’édifice et de la manifestation concernés et, selon les buts, le statut et le revenu de son organisateur. C’est pourquoi un système de tarification dégressif a d’ores et déjà été mis en place par le Centre des monuments nationaux : ainsi, les manifestations organisées par des professionnels du spectacle sont facturées 762,25 euros (5 000 francs), pour un public inférieur ou égal à 600 personnes, et 1 067,14 euros (7 000 francs) lorsque le public excède ce nombre (sans pouvoir jamais dépasser, bien entendu, les limites fixées pour chaque édifice par les impératifs de sécurité du public et de conservation du monument). Les associations et ensembles amateurs sont astreints à une redevance de 457,35 euros (3 000 francs) lorsque la manifestation donne lieu à la mise en place d’une billetterie, c’est-à-dire lorsqu’il s’agit d’une manifestation d’accès payant. Enfin, lorsque la manifestation est d’accès gratuit, sans billetterie, la redevance n’est que de 106 ,71 euros (700 francs) par jour, correspondant en fait uniquement aux frais d’assurance et aux frais de gestion du dossier. Encore cette somme peut-elle être diminuée lorsque l’organisateur justifie d’un contrat d’assurance présentant des garanties égales ou supérieures au contrat type souscrit par le Centre des monuments nationaux. Ce système tarifaire sera encore perfectionné, de manière, notamment, à prendre en compte la situation des organisateurs de manifestations dotés de très faibles moyens, mais dont la programmation de qualité contribue à la vie et à la valorisation de l’édifice, et dont la mise en place d’une billetterie constitue non pas une source de revenu, mais le seul moyen de pourvoir au règlement des charges diverses et à la rémunération des artistes invités à se produire dans les cathédrales. Un système de conventions de partenariat entre le centre des monuments nationaux et ces intervenants sera mis en place, en liaison avec l’affectataire cultuel des édifices. Ce système, qui repose sur la reconnaissance, par les directions régionales des affaires culturelles et les architectes des Bâtiments de France, conservateurs des édifices, de l’intérêt de la qualité des manifestations organisées, devrait permettre de donner aux petites structures ou associations culturelles toute la place qui doit être la leur dans la vie des cathédrales. L’interdiction de fumer dans les cathédrales ne saurait être mise en cause, tant pour des impératifs de sécurité du public et de conservation des édifices que pour la préservation de la santé publique. Des modes d’avertissement plus souples que l’indication de cette interdiction sur chacun des billets vendus seront proposés. La mise en place d’extincteurs supplémentaires ne constitue que la réponse aux demandes émises par les commissions de sécurité compétentes lors de leurs passages réguliers dans les cathédrales. Enfin, l’utilisation des réseaux électriques des cathédrales ne peut être autorisée qu’à une double condition. Il convient tout d’abord qu’elle ne soit susceptible d’aucune conséquence dommageable en termes de sécurité. Il appartient à l’architecte des Bâtiments de France, conservateur de l’édifice, de se prononcer sur cette question, en exigeant, si nécessaire, et dans le cas d’installations électriques exceptionnelles, le certificat d’un bureau de contrôle agréé. La consommation de ces réseaux étant d’autre part fréquemment à la charge du clergé, affectataire cultuel des cathédrales, il convient que l’organisateur de manifestation ait recueilli son accord pour l’utilisation du réseau, et ait pris avec lui un arrangement pour le remboursement des dépenses occasionnées.