Assemblée nationale 12ème législature
Question écrite
Nº 31925
de M. Le Roux Bruno (Socialiste – Seine-Saint-Denis)
Ministère interrogé : intérieur
Ministère attributaire : intérieur
Question publiée au JO le 20/01/2004 p. 438
Réponse publiée au JO le : 11/05/2004 p. 3497
Texte de la QUESTION :
M. Bruno Le Roux souhaite attirer l’attention de M. le ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur l’articulation des règles d’urbanisme et de la liberté du culte. En effet, il s’agit de savoir si une commune a le droit, alors qu’elle ne dispose d’aucune zone urbaine appropriée dans son plan d’occupation des sols (aujourd’hui PLU), d’interdire l’occupation d’un immeuble destiné à l’usage du culte des membres de l’association qui en est propriétaire. Dans la mesure où cet immeuble est doté de tous les équipements de sécurité, d’un dispositif d’insonorisation et qu’il ne génère aucun trouble de voisinage, le maire de la commune peut-il opposer une disposition du POS selon laquelle l’immeuble est édifié sur une ZAC où sont « notamment autorisées les constructions et leur utilisation à usage d’artisanat, tertiaires et de commerce non alimentaires ». Cette restriction de toute possibilité de posséder des locaux destinés à des manifestations cultuelles dans cet espace paraît contrevenir à la liberté d’exercice du culte prônée par l’article 2 de la Constitution, par l’article 1er de la loi du 9 décembre 1905 et consacrée par le Conseil constitutionnel en tant que principe fondamental reconnu par les lois de la République dans sa décision du 23 novembre 1977. Dès lors, il lui demande de bien vouloir indiquer la hiérarchie des normes qui doit s’appliquer dans un pareil cas que les maires et les associations cultuelles sont susceptibles de rencontrer assez fréquemment.
Texte de la REPONSE :
L’article 1er de la loi du 9 décembre 1905, concernant la séparation des églises et de l’État, garantit le libre exercice des cultes, sous la seule réserve des nécessités de l’ordre public. L’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales habilite le maire en vertu de son pouvoir de police municipale, à assurer le bon ordre dans les endroits où s’opèrent de grands rassemblements d’hommes et notamment dans les lieux de culte. Par ailleurs, les établissements de culte sont soumis à la réglementation concernant les établissements recevant du public (arrêté du ministre de l’intérieur du 25 juin 1980 – art. GN1), ce que le Conseil d’Etat a confirmé (association internationale de Krisna – 14 mai 1982). L’autorité administrative est donc habilitée, sur la base de l’avis de la commission de sécurité, à interdire temporairement l’accès d’un édifice cultuel, si celui-ci présente un danger pour la sécurité des usagers. Sauf pour ces motifs, le maire ne peut, en règle générale, sans porter une atteinte illégale à la liberté des cultes, interdire toute cérémonie ou tout office religieux à l’intérieur d’un immeuble (CE. Association internationale pour la conscience de Krisna – 14 mai 1982 – précité). Toutefois, la liberté des cultes s’exerce dans le respect des lois et règlements en vigueur. L’article L. 123-1 du code de l’urbanisme dispose que les plans locaux d’urbanisme comportent un règlement qui fixe, en cohérence avec le projet d’aménagement et de développement durable, les règles générales et les servitudes d’utilisation des sols. A ce titre, ils peuvent définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées, fixer les emplacements réservés aux voies et ouvrages publics, aux installations d’intérêt général ainsi qu’aux espaces verts. Le caractère d’installation d’intérêt général, au sens de l’article L. 123-1 du code de l’urbanisme, a été reconnu par le Conseil d’Etat pour des édifices cultuels (arrêt Alleray-Procession – 25 septembre 1996). Ces édifices peuvent donc faire l’objet d’un emplacement réservé dans un plan local d’urbanisme. L’article L. 123-2 dudit code dispose que dans les zones d’aménagement concerté, le plan local d’urbanisme précise la localisation prévue pour les principaux ouvrages publics, les installations d’intérêt général et les espaces verts. L’utilisation d’un immeuble à usage cultuel doit être compatible avec les dispositions d’un plan local d’urbanisme ou d’un règlement de zone d’aménagement concerté, à la date d’approbation de celui-ci (CE – association cultuelle des témoins de Jéhovah – 28 septembre 1990). En tout état de cause, la commune devra s’efforcer de rechercher, en fonction du contexte local, les solutions qui tiennent compte de l’intérêt public qui s’attache à l’existence d’édifices permettant à toutes les confessions existant dans notre pays de célébrer leur culte dans des conditions d’égale dignité, conformément à l’article let de la loi du 9 décembre 1905.