Circulaire du ministre de l’Education nationale n° 88-112 du 22 avril 1988 sur l’enseignement religieux et les aumôneries dans l’enseignement public

BOEN n° 16 du 28 avril 1988 p. 1063
NOR : MENL8800692C

Texte adressé aux recteurs, aux inspecteurs d’académie, directeurs des services départementaux de l’Éducation, et aux chefs d’établissement.

Il est apparu nécessaire de préciser les modalités d’application de la réglementation relative à l’enseignement religieux et aux aumôneries dans l’enseignement public fixée par le décret n° 60-391 du 22 avril 1960 et l’arrêté du 8 août 1960. Les nombreuses modifications qui ont marqué le système éducatif au cours des dix dernières années ont une incidence sur le fonctionnement des services d’aumônerie. Ainsi, la décentralisation a modifié le statut des établissements et confié aux conseils d’administration des responsabilités en matière d’organisation du temps scolaire et d’utilisation des locaux qui doivent être prises en compte. De même, les lois relatives à l’amélioration des relations entre l’administration et les usagers (« Motivation des actes administratifs » – « Informatique, fichiers et liberté ») modifient les procédures instituées en 1960.
La présente circulaire traite uniquement de l’enseignement religieux dispensé dans les établissements publics d’enseignement par les services d’aumônerie.
Les circulaires du 8 août 1960, du 8 septembre1961, du 27 octobre 1961, du 13 juin 1962, n° IV-67-351, du 27 décembre 1967 et n° 79-452 du 19 décembre 1979 sont abrogées.

I. – Création d’aumôneries

Pour les établissements publics d’enseignement du second degré, la création d’une aumônerie est liée à l’existence d’une demande émanant des familles.
Les demandes présentées par les parents, les représentants légaux d’élèves ou par les élèves majeurs doivent être établies individuellement, à l’exclusion de toute formule collective portant seulement la signature des intéressés. Elles sont adressées au chef d’établissement.
Elles peuvent être établies sur formulaire ou sur papier libre dès lors que le culte choisi, le nom de la famille, l’adresse, la signature, portés à la main, manifestent clairement la volonté de la famille intéressée.

I A . – Dans les établissements comportant un internat, l’institution du service d’aumônerie est de droit dès qu’elle a été demandée.
Le chef d’établissement fait alors connaître au recteur :
– l’effectif, par classe et par confession, des élèves désireux de suivre un enseignement religieux ;
– l’horaire prévu pour chaque groupe ;
– les locaux où l’enseignement doit être donné.

I B . – Les établissements qui ne comportent pas d’internat peuvent être dotés d’un service d’aumônerie sur décision du recteur.
1) Dans le délai prévu à l’article de l’arrêté du 8 août 1960, c’est-à-dire deux semaines après la rentrée scolaire , le chef d’établissement doit adresser au recteur un dossier comprenant la totalité des demandes reçues, la répartition des élèves intéressés entre les différents cultes et les différentes classes, les conditions dans lesquelles cet enseignement peut être donné, soit à l’intérieur, soit à l’extérieur de l’établissement, compte tenu des considérations suivantes :
– organisation de la semaine scolaire, avec indication des activités scolaires ou parascolaires organisées le mercredi ;
– proximité ou éloignement des lieux de culte ;
– caractéristiques des élèves concernés (âge, répartition entre externes et demi-pensionnaires…) ;
– contraintes externes telles que les horaires des services de transport scolaire ;
– existence ou non, à l’intérieur de l’établissement, de locaux pouvant être utilisés pour l’enseignement religieux ;
– avis du conseil d’administration de l’établissement sur les conditions de fonctionnement du service d’aumônerie. Si le conseil d’administration n’a pu être saisi de cette question dans le délai donné au chef d’établissement pour établir son rapport, cet avis devra parvenir comme complément au recteur avant l’échéance laissée à celui-ci pour décision.
Compte tenu de la brièveté du délai imparti, il est souhaitable que les demandes des familles et l’avis du conseil d’administration soient recueillis avant la fin de l’année scolaire précédant celle de l’envoi du dossier au recteur.
2) II appartient au recteur seul de juger du bien fondé de la demande. Le chef d’établissement doit lui transmettre la totalité des demandes qui lui ont été adressées, accompagnées de toutes observations et suggestions qu’il estimerait devoir formuler personnellement. Le recteur peut demander les éléments d’information complémentaires et s’entourer des avis qu’il juge nécessaires.
L’appréciation du recteur porte sur deux points distincts :
– sur l’opportunité de la création d’une aumônerie. La règle générale doit être d’accorder satisfaction aux voeux des demandeurs, même si ceux-ci ne représentent qu’un très faible pourcentage de l’effectif total de l’établissement. Un refus, en effet, leur porte préjudice alors que la création du service de l’aumônerie ne nuit en rien aux convictions ni à la liberté de conscience des autres membres de la communauté scolaire ;
– sur l’opportunité d’organiser l’enseignement à l’intérieur de l’établissement. Le recteur dispose à cet égard de la liberté d’appréciation la plus large.

l C . – Que l’établissement scolaire comporte ou non un internat, l’organisation du service d’aumônerie ne devient définitive qu’après l’agrément par le recteur sur proposition des autorités religieuses concernées, du responsable de l’aumônerie et, éventuellement, des personnes qui l’aideront en qualité d’adjoint (cf. articles 6 et 7 du décret n° 60-391 du 22 avril 1960).
La désignation d’un adjoint peut être autorisée quand le nombre ou la répartition des heures d’enseignement le rend nécessaire.
Pour tenir compte de situations locales, le recteur peut, à la demande de l’autorité religieuse et après avis des chefs d’établissement, être conduit à autoriser la constitution d’équipes de responsables d’aumônerie nommément désignés en vue d’exercer soit dans un ensemble d’établissements scolaires, soit auprès d’élèves d’un même établissement mais de niveaux différents.

l D . – La décision du recteur sur la création de l’aumônerie doit être notifiée au chef d’établissement avant le 1er novembre.
Le recteur peut demander un complément d’information qui doit être fourni dans la quinzaine qui suit, ou prescrire des modifications ou un complément aux dispositions proposées.
Dans toute la mesure du possible, l’ensemble des décisions du recteur nécessaires au fonctionnement d’une aumônerie doit ainsi intervenir dans le courant du premier trimestre pour permettre à l’aumônerie d’entrer en activité lors de la rentrée scolaire du second trimestre.
Lorsqu’un établissement doté d’une aumônerie change de statut ou de locaux, le service d’aumônerie sera maintenu, sauf empêchement qu’il appartiendra au recteur d’apprécier.
Les décisions négatives du recteur devront être motivées au sens de la loi n° 86-76 du 17 janvier 1986 qui élargit le domaine de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs à une nouvelle catégorie de décisions : les refus d’autorisation (cf. ma note de service n° 87.435 du 18 décembre 1987 annexe A.6. – BO n° 2 du 14 janvier 1988).

Il. – Fonctionnement de l’aumônerie

Une fois connu l’agrément du recteur, le responsable de l’aumônerie sera reçu par le chef d’établissement qui examinera avec lui les conditions de fonctionnement de l’aumônerie.

II A. – Inscription des élèves
Lors de la création du service d’aumônerie, ou lors de la première inscription d’un élève dans l’établissement, le chef d’établissement doit informer l’élève, s’il est majeur, ou ses parents ou représentants légaux de l’existence d’un service d’aumônerie.
1 . – Pour le premier cycle
S’il s’agit d’une première inscription de l’élève dans l’établissement, les parents ou représentants légaux indiquent, sur la fiche d’inscription qu’ils doivent remplir et qui doit comporter une rubrique à cet effet, ou à défaut, sur un feuillet ad hoc annexé à cette fiche, s’ils désirent que l’élève suive les activités du service d’aumônerie ; dans l’affirmative, ils précisent le culte choisi.
2. – Pour le second cycle
Les élèves font eux-mêmes cette demande. Pour les élèves mineurs, les parents en seront informés et pourront s’y opposer.
3. – Dispositions communes
S’agissant des élèves en cours de scolarité, leur inscription aux activités du service de l’aumônerie sera effectuée dans des délais fixés d’un commun accord par le chef d’établissement et le responsable de l’aumônerie, ou à défaut à tout moment de l’année. Les formulaires d’inscription dans l’établissement scolaire ou tout autre document comportant des questions relatives à l’enseignement religieux doivent préciser clairement que les réponses à ces questions sont facultatives. En outre, les chefs d’établissement devront faire savoir aux parents ou à l’élève majeur que l’inscription aux activités du service d’aumônerie peut entraîner la nécessité de conserver l’enregistrement de cette inscription dans un fichier manuel ou informatisé. À cet effet, ils devront impérativement recueillir l’accord exprès des intéressés. Les dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, notamment ses articles 27 et 31, les notes de service n° 85-470 du 13 décembre 1985 et n° 87-99 du 31 mars 1987 portant publication de délibérations de la commission nationale de l’informatique et des libertés doivent être respectées. Le choix fait lors de la première inscription vaut tant qu’il n’a pas été modifié par écrit. Les noms et adresses des élèves inscrits seront tenus à la disposition du responsable de l’aumônerie qui devra refuser de recevoir les élèves non inscrits et les renvoyer au chef d’établissement responsable de leur scolarité auprès des familles. Le chef d’établissement, dès le commencement des activités du service d’aumônerie, informera par écrit les personnes concernées des conditions d’organisation de ces activités et de leur horaire. Il peut en autoriser l’affichage.

II B. – Conditions d’organisation de l’aumônerie
1) L’enseignement religieux prend place dans le cadre du temps scolaire normal de l’établissement dont les principes sont fixés par le conseil d’administration en vertu de l’article 2 du décret n° 85-924 du 30 août 1985 relatif aux EPLE.
En règle générale, il est dispensé le mercredi ou, en cas d’empêchement, aux heures laissées libres à l’emploi du temps. À cet égard, une concertation préalable entre le chef d’établissement et le responsable de l’aumônerie est indispensable pour fixer cet horaire en fonction de contraintes multiples (activités socio-éducatives de l’établissement, organisation d’études dirigées et d’activités de soutien, activités organisées par la collectivité territoriale pendant les heures d’ouverture de l’établissement (art. 26 de la loi du 22 juillet 1983) modification des heures d’entrée et de sortie de l’établissement par le maire (art. 27 de la loi du 22 juillet 1983), transports scolaires, etc). Il sera également tenu compte de la disponibilité des responsables de l’aumônerie.
Lorsqu’une modification de l’organisation du temps scolaire est envisagée par le conseil d’administration de l’établissement, les autorités des différents cultes concernés doivent être consultées, avant décision du conseil d’administration, au même titre que les autres partenaires de l’établissement scolaire.
Si pour une raison particulière (cérémonies, visites médicales, sorties et voyages, activités exceptionnelles de l’établissement, etc.), les élèves ne peuvent se rendre à l’aumônerie, le chef d’établissement en avertit, au moins deux jours à l’avance, te responsable de l’aumônerie. La rencontre ainsi supprimée est récupérée par accord entre eux.
2) En vue de faciliter le libre exercice du service de l’aumônerie lorsqu’il fonctionne à l’intérieur de l’établissement, le chef d’établissement devra réserver à des heures déterminées une salle permettant au responsable de l’aumônerie de recevoir les élèves inscrits. Une délibération du conseil d’administration pourra prévoir d’affecter spécifiquement un local de l’établissement à l’aumônerie.
3) Dans le cas où l’aumônerie a été créée à l’intérieur de l’établissement, un certain nombre d’activités religieuses sont néanmoins susceptibles d’avoir lieu à l’extérieur. Les internes peuvent, après accord écrit de leurs parents, être autorisés à participer à ces sorties organisées sous la surveillance du responsable de l’aumônerie.

Il C. – Modalités administratives de fonctionnement
II convient de distinguer deux situations précises.
1) Les services d’aumônerie fonctionnant à l’intérieur de l’établissement scolaire
Pendant le temps où les élèves sont placés sous la garde du responsable de l’aumônerie, la responsabilité de l’État est substituée à celle du responsable de l’aumônerie dans les conditions de la loi du 5 avril 1937. En cas d’accident, le responsable de l’aumônerie doit donc, comme les enseignants, en rendre compte, verbalement et par écrit, au chef d’établissement.
Le responsable de l’aumônerie n’assiste à aucun conseil de caractère administratif ou pédagogique. À l’intérieur de l’établissement, son activité est uniquement consacrée à l’instruction et à la formation religieuse des élèves qui lui sont confiés.
Les dépenses relatives au culte et à l’enseignement religieux sont à la charge des familles, les collectivités publiques pouvant y contribuer conformément aux dispositions de l’article 2 de la loi du 9 décembre 1905.
2) Les services d’aumônerie fonctionnant en dehors de l’établissement scolaire
Les élèves devant, pour assister aux activités du service d’aumônerie, quitter l’établissement et y revenir, la responsabilité du chef d’établissement est dégagée pendant la durée de leur absence. C’est au responsable de l’aumônerie qu’il appartient de venir les chercher et de les ramener à l’établissement, où leur retour sera contrôlé dans les conditions réglementaires.
Si les activités de l’aumônerie se situent en début ou en fin de période scolaire, le trajet entre le domicile et le local d’aumônerie est assimilé au trajet entre le domicile et l’établissement scolaire et les élèves peuvent l’effectuer sans accompagnement.

Dans les établissements ne comportant pas d’aumônerie, l’enseignement religieux est laissé à la discrétion des familles. Toutefois, dans les collèges, les chefs d’établissement doivent, avant d’établir l’organisation de la semaine scolaire, se mettre en rapport avec les autorités religieuses compétentes afin de s’assurer que les familles qui le désirent soient en mesure de faire donner à leurs enfants l’instruction religieuse de leur choix.
Par ailleurs, les chefs d’établissement sont responsables de l’application du règlement intérieur de l’établissement, qui rappelle notamment le devoir pour chaque membre de la communauté scolaire de veiller au respect des principes de laïcité et de pluralisme ainsi que le devoir de tolérance et de respect d’autrui dans sa personnalité et dans ses convictions (cf. article 3 du décret n° 85-924 d’août 1985).

Quelles que soient les modalités selon lesquelles sera organisé et dispensé l’enseignement religieux, les chefs d’établissement ont un rôle déterminant dans l’application de cette réglementation qui suppose une importante concertation avec les responsables de l’aumônerie. S’il survient des difficultés, ils voudront bien, si la négociation locale n’aboutit pas, en rendre compte par la voie hiérarchique au recteur d’académie, qui étudiera le problème posé en liaison avec l’autorité religieuse compétente.

Pour le ministre et par délégation, le directeur des Lycées et Collèges,
M. Lucius