Assemblée nationale 15ème législature
Question écrite
N° 17402
de Mme Emmanuelle Anthoine (Les Républicains – Drôme )
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère attributaire : Intérieur
Question publiée au JO le : 26/02/2019 p. 1828
Réponse publiée au JO le : 30/07/2019 p. 7161
Texte de la QUESTION :
Mme Emmanuelle Anthoine interroge M. le ministre de l’intérieur sur le statut des congrégations religieuses défini par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association. Ce statut s’avère particulièrement contraignant, de telle sorte que « la République maintient les congrégations sous une forme de tutelle » tel que l’affirmait le Président de la République Nicolas Sarkozy en 2007. En outre, ce régime contraignant, dérogatoire au droit commun des associations contreviendrait aux engagements internationaux de la France et plus particulièrement au droit conventionnel issu de la Convention européenne des droits de l’homme. La liberté de religion (article 9) et la liberté d’association (article 11), ainsi que le principe de non-discrimination consacrés par ce texte semblent incompatibles avec le maintien d’une telle tutelle. C’est pourquoi, elle souhaite savoir si le Gouvernement envisage de supprimer ce régime dérogatoire au droit commun en parallèle de la réforme à venir de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des églises et de l’État.
Texte de la REPONSE :
La procédure de reconnaissance légale constitue le fondement de la tutelle administrative de l’État sur les congrégations religieuses. Elle a été instaurée en 1901 dans un climat de défiance de l’État vis-à-vis des congrégations. Dans sa rédaction initiale, l’article 13 de la loi du 1er juillet 1901 prévoyait que les congrégations ne pouvaient être autorisées en France que sur le fondement d’une autorisation législative. La loi du 8 avril 1942 a simplifié ce régime en prévoyant que « toute congrégation religieuse peut obtenir la reconnaissance légale par décret rendu sur avis conforme du Conseil d’État ». La procédure a donc été simplifiée, ne nécessitant plus que la prise d’un décret par le Premier ministre après avis conforme du Conseil d’État, laquelle, en vertu du parallélisme des formes, s’applique également pour les abrogations. L’expression « reconnaissance légale » ne correspond donc plus à la réalité normative. Le décret n° 2018-674 du 30 juillet 2018 a encore assoupli ce régime en prévoyant que les demandes de modification statutaire ne nécessitent plus que la prise d’un arrêté ministériel. Sur la question de l’inconventionnalité de ce régime aux exigences de la Cour européenne des droits de l’Homme, il convient de rappeler les réponses données par le Conseil d’État aux questions qui lui ont été soumises par le ministre de l’intérieur. Dans un premier avis du 12 juillet 1983, le Conseil d’Etat a rejeté l’interprétation proposée de la jurisprudence constitutionnelle reconnaissant la valeur constitutionnelle de la liberté d’association en 1971, laquelle devait permettre aux congrégations de se constituer en associations « loi 1901 » selon le régime de droit commun à partir de cette date. Dans un second avis du 14 novembre 1989, le Conseil d’Etat a posé le principe selon lequel tout groupement de personnes qui réunit un ensemble d’éléments de nature à caractériser une congrégation, tels que la soumission à des vœux et une vie en commun selon une règle approuvée par une autorité religieuse, ne peut que se placer sous le régime de la congrégation religieuse défini par le titre III de la loi du 1er juillet 1901. Ce principe a été réaffirmé par le Conseil d’Etat dans son Rapport public de 2004 rappelant « la spécificité du régime des congrégations par rapport à celui des associations » et les principes posés dans les avis de 1983 et 1989. Il convient également de rappeler que les congrégations ont la possibilité d’opter librement pour le régime de la reconnaissance légale ou pour celui de la congrégation de fait qui peut être complété par des associations « loi 1901 » annexes pour la réalisation de certains buts spécifiques.